Dans ce blog vous trouverez des portraits de quelques centaines de plantes et fleurs sauvages du Périgord. Au fil des saisons des nouvelles images seront ajoutées.

Corine Oosterlee, botaniste et photographe, vous propose également des Balades Botaniques guidées et autres activités autour de la flore sauvage, la végétation et la nature en Périgord. Pour en savoir plus regardez sur baladebotanique.fr.

Son site photographie est corineoosterlee.com.


23 octobre 2022

Trépane en ombelle

 

On est fin octobre, mais en regardant ce champ, on peut penser qu'on est au mois de mai, il y a tellement de fleurs!

Ce sont pour la plupart des espèces qui fleurissent avant et après la sècheresse de l'été, et le peu de pluie qui est tombée a suffi pour démarrer la floraison. Les trèfles fourragères qui ont été semé ici sont carrément minoritaires.

 

 

 

Dans ce champ au sol sablonneux, à la limite d'une châtaigneraie, une petite fleur aux couleurs inhabituelles saute aux yeux.


 

 

La Trépane en ombelle (Tolpis umbellata) est une Asteracée. Dans ses capitules on voit des fleurs rayonnantes jaune pâle qui entourent celles du coeur qui sont rouge foncé.

 

 

Chaque fleur ligulée n'a qu'une pétale qui est frangée sur l'extrémité, la ligule. Les ligules extérieures sont beaucoup plus longues que les intérieures, jaune citron et rouge. Les stigmates sont à peine visibles sur la photo, ils sont cachés entre les ligules. On ne voit que quelques petites taches jaunes de pollen.


 

Les fleurs dans la capitule sont entourées par un involucre de bractées vertes qui ont tous la même longeur et qui sont couvertes d'un léger feutre grisâtre. Les bractées externes plus longues et irrégulières forment une sorte de couronne à la base de la capitule. On voit également, un peu plus bas sur la tige, quelques feuilles bractéales, des feuilles qui ressemblent à des bractées.

 


 

La Trépane en ombelle est une plante plutôt méditerranéenne et en Dordogne on ne la trouve pas souvent, elle est vraiment à la limite de son aire. On pourrait penser que avec le changement climatique elle va devenir plus commune ici. Mais cela n'est pas sûr du tout, pour s'épanouir elle a besoin des champs de culture sur sol sablonneux sans trop d'engrais et traitement chimique et ce type de champs est en train de disparaître rapidement.

 

 

19 septembre 2022

Ambroisie à feuilles d'armoise

 

C'est une belle plante, l'Ambroisie à feuilles d'armoise (Ambrosia artemisiifolia). Elle est originaire des Amériques et elle se sent bien à l'aise en France. Il y a quelques années on ne la voyait à peine, et maintenant on la trouve partout.


 

Elle est érigée comme un petit arbre de noel avec beaucoup de branches, et chaque branche porte des petites fleurs.

 

 

La couleur rouge des branches fait un joli contraste avec le vert tendre des feuilles finement découpées et les petites fleurs.



La plante est monoique, cela veut dire qu'elle a des fleurs mâles et femelles. Ci-dessus les fleurs mâles juste commencent à lâcher le pollen jaune. Quelques fleurs femelles, avec des longs pistils blancs, sont également visibles. Le pollen est dispersé avec le vent.




C'est une annuelle qui peut former des colonies importantes. La voilà dans un champ de blé après la récolte des céréales. Les graines ont germé au printemps et commencé à pousser un peu plus tard que le blé. Quand la moissonneuse passait, les plantules étaient encore trop petites pour être détruites par la machine. Après la moisson elles n'éprouvaient plus la compétition du blé et elles pouvaient pousser plus vite et plus grandes. 


 

En septembre le champ est devenu jaune, pas à cause de la sècheresse mais parce que l'agriculteur a fait un traitement herbicide pour se débarasser des mauvaises herbes. Il a bien réussie son affaire, il n'y a plus beaucoup de plantes vivantes. Avec une exception: l'Ambroisie à feuilles d'armoise est encore bien verte et elle est en train de produire beaucoup de graines.

Si au printemps prochain les circonstances seront bonnes, ces graines vont germer. Elles ont besoin d'une terre qui n'est pas couverte d'autre plantes et qui est bien travaillée. L'agriculteur va faire ce qu'il peut. Il a déjà tué les autres plantes, et avec son prochain passage avec le tracteur et la herse il meublira la terre. Ainsi, un bon lit de sémence sera préparé. En même temps il répandra les graines, pas seulement dans ce champ, aussi ailleurs, dans des autres champs. C'est efficace, parce que les tracteurs modernes font beaucoup plus de kilomètres dans une journée que celles de nos grands-parents. Une bonne récolte d'Ambroisie à feuilles d'armoise l'année prochaine est quasiment garantie.

Est-ce que les agriculteurs veulent vraiment cultiver l'Ambroisie à feuilles d'armoise? Décidément non, c'est une plante qui n'est pas utile pour eux et qui n'est pas comestible pour animaux ou humains. Le pollen est allergène et une seule plante produit beaucoup de pollen. l'Ambroisie peut couvrir en quelques années une grande surface et empêcher les cultures à pousser. Elle n'est sensible ni au gel ni à la sècheresse et elle sait survivre dans beaucoup de circonstances. En court, on peut la considérer comme nuisible. En plus, il y a une obligation légale de la détruire et de faire ce qu'on peut pour l'éradiquer.

Est-ce qu'il est possible de l'éradiquer? Peut-être, mais cela demande beaucoup de dévouement de la part des agriculteurs. La destruction chimique est difficile - la plante résiste à beaucoup de désherbants - et seulement utile quand c'est fait au bon moment, avant la montée en graines de la plante. Idem pour la destruction méchanique par fauchage ou broyage, qui doit être repetée souvent pour éviter les repousses. L'installation d'une culture pluriannuelle comme par exemple la lucerne qui couvre le sol et ainsi empêche les graines de germer peut aider, mais en ce cas, il n'y aura pas de céréales ou du mais.

Est-ce qu'il est désirable d'essayer de l'éradiquer? En tout cas il y aura beaucoup de dommages collatéraux. En détruisant les Ambroisies on détruit les autres espèces vivantes sur la parcelle, des plantes, dont les espèces patrimoniales qu'on préfèrerait à protéger, des insectes, des espèces vivantes dans le sol, et toute la vie qui dépend d'eux. Il y a une raison pourquoi le nombre d'hirondelles à baissé tant. Aussi il est très rare qu'on arrive à éradiquer une espèce invasive même si on fait vraiment un effort. Les lapins en Australie sont encore là, et les frelons asiatiques sont encore en expansion en France. Même chose pour la Rénouée du Japon ou la Jussie, pour mentionner quelques plantes. Aucune raison pourquoi cela serait différent pour l'Ambroisie à feuilles d'armoise.

 

Un vrai casse-tête.

Quoi faire (ou ne pas faire) avec l'Ambroisie et les autres plantes exotiques et envahissantes??? 

Bonne question...








18 août 2022

Stramoine

 

Dans ce champ de culture poussaient autour de 130 différentes espèces de plantes sauvages. Pour la plupart ces 'mauvaises herbes' étaient des messicoles, des plantes avec une cycle de vie adaptée à la culture des céréales. Elles étaient en général petites, parfois à peine visibles parmi les épis de triticale. 

Maintenant tout a changé. Il y a quelques années, le bail est repris par un nouveau agriculteur et il travaille différemment. Par conséquence, les 'mauvaises herbes' ont changé aussi. Toutes les messicoles sont disparues, et à leur place quelques nouvelles espèces sont apparues, des plantes grandes et vigoureuses qui prennent beaucoup de place. Maintenant on ne trouve ici que une trentaine d'espèces de plantes spontanées, et celles-ci sont présentes en grande quantité. Ce sont des plantes annuelles très compétitives, qui poussent vite quand il y a beaucoup d'azote dans le sol, et qui se multiplient rapidement. Elles profitent des circonstances créées pour le mais ou le tournesol ou toute autre culture sarclée où on met un grand apport d'engrais. Parce qu'elles sont moins que les autres plantes gênées par les herbicides ou fongicides elles peuvent survivre longtemps dans les cultures traitées.

 

  

Un beau pied de Stramoine (Datura stramonium) pousse ici. Il y avait des graines dans le sol, et une petite plantule, germé quand la triticale était encore en train de pousser, c'est développé en une grande plante dans moins de deux mois.

 

Ici une colonie dans un champ de mais.  La Stramoine fait partie de la famille des Solanacées, et comme beaucoup d'autres membres de cette famille elle est toxique et les agriculteurs n'aiment pas la trouver dans leurs cultures.


Les grandes fleurs ne s'ouvrent que la journée. Ce sont des trompettes avec des lobes pointues, bien décoratives.


Aussi les fruits épineux sont décoratifs. Ils contiennent des nombreuses graines noires qui se sèment facilement. Pas seulement dans les champs de culture mais aussi dans des lieux rudéralisés.


 

À la fin de la saison beaucoup de feuilles ont tombées et on voit surtout les branches squélettiques. C'est sûrement un tracteur qui a apporté les graines dans ce tas de terre et pierres, dans la benne ou avec la boue qui colle aux roues.

 

3 juillet 2022

Cotonnière commune

 

Il n'est pas exceptionnel du tout quand une plante s'adapte à une vie à côté de nous humains. L'agriculture a créé des possibilités pour beaucoup de plantes sauvages. Le travail régulier du sol élimine la compétition des autres plantes pour la place, les nutriments, l'eau et la lumière et ameublit le sol pour que les graines puissent germer et s'enraciner facilement.

La Cotonnière commune (Filago pyramidata) pousse dans les champs de culture et dans les friches ou dans des habitats qui ressemblent à cela. Apparemment elle a une certaine résistance contre les désherbants et fongicides utilisés couramment dans les cultures de céréales parce qu'on la trouve assez souvent. Le champ de blé après récolte sur la photo est en bio, d'ailleurs.


La Cotonnière commune est une plante assez rigide avec à la fin de chaque branche en candelabre une tête ronde avec des petites fleurs jaunes.  Elle a un aspect grisâtre, les tiges et les petites feuilles sont couvert d'un duvet feutré qui les protège contre la sècheresse et peut-être aussi contre les insectes prédateurs.

Comme toutes les plantes de la famille des Asteracées elle a des têtes de fleurs composées. En ce cas, les têtes sont doublement composées. Ce qu'on voit est une boule verte arrondie avec des petites pointes jaunâtres.


Chaque pointe jaunâtre est une tête de 5 mm de long avec quelques fleurs tubulaires entourées par des bractéoles verts avec des poils comme une toile d'araignée ou du feutre. Vingt ou trente de ces têtes forment ensemble une boule avec à la base deux ou trois bractées un peu plus grande que la boule. Et chaque plante peut porter des dizaines de boules. Combien de fleurs fait la Cotonnière commune? Peut-être des centaines, avec aussi des centaines de graines pour garantir sa progéniture.

Par ce fait elle se distingue des 'vrais' messicoles, des plantes totalement adaptée aux moissons, qui ont une cycle de vie en même temps et avec la même durée que les céréales, et qui ne font que peu de graines, souvent de la même taille que les graines de blé.

 

Dans un champ de culture laissé en friche pendant un an on trouve beaucoup de plantes différentes. Parmi les Vulpies (les graminées blondes) on voit entre autre le jaune d'un pied de Millepertuis en fleur mais aussi des belles touffes de Cotonnière commune.


Ici la Cotonnière commune est déjà assèchée même si il y a encore des plantes vertes qui l'entourent. Pourquoi la plante est déjà quasiment morte? Je ne sais pas. Le champ est sec et aride, il est destiné à la plantation de chênes truffiers. Aussi, cette année on a eu des périodes avec beaucoup de pluie et des périodes avec des grandes châleurs, et beaucoup de plantes ont poussé plus vite et plus grandes que d'habitude. Peut-être que la Cotonnière commune a déja fait ses graines et qu'elle a décidé que sa saison est terminé avant l'été. On ne peut pas la poser la question.

 

1 juillet 2022

Doradille noire

Après plus d'un an, je vous propose de nouveau des portraits de plantes du Périgord sur ce blog.

 

Les fougères sont des plantes à spores. Dans leur cycle de vie les spores donnent naisssance à des structures qu'on appelle prothalles. Ces prothalles ne ressemblent pas du tout à la fougère comme nous la connaissons, elles sont des toutes petites et n'ont pas de frondes. Sur ces prothalles les organes sexuelles, elles aussi très petites, se forment et après fécondation la sporophyte, la 'vraie' fougère, la plante que nous reconnaîtrons facilement comme telle, se développe. Quand la fougère a atteint la maturité elle produit les spores et le cycle peut recommencer.

La plupart des fougères a besoin d'humidité au stade des prothalles, si non la fécondation ne peut pas prendre place. Pas de problème dans les régions montagnardes avec les pentes ombragées et beaucoup d'eau qui coule sur les rochers, mais ici en Dordogne où l'eau disparaît vite dans le rocher calcaire poreuse c'est un peu plus compliqué. 

Donc le Périgord n'est pas spécialement riche en fougères. Mais, surtout dans les vallées, on peut trouver des beaux endroits couverts de frondes. Comme ci-dessous, sur un ancien chemin où il y a encore les restes des murets de pierre qui l'ont jadis bordé.

 


 

Nous verrons ici beaucoup de longues 'langues' du Langue de cerf (Asplenium scolopendrium), au centre de l'image en haut du 'mur' les frondes une fois divisées d'un Polypode (Polypodium sp.) et un peu plus à droite des petites frondes plus fines de la Doradille noire (Asplenium adiantum-nigrum).

De celle-là, voilà son portrait au printemps, quand les nouvelles frondes sortent du sol. La Doradille noire a des tiges noires et des frondes qui sont plusieurs fois divisées en fines pinnules.

 


 

Elle pousse dans les forêts des feuillus, surtout les chênaies et charmaies mais aussi dans les bois mixtes avec des châtaigniers, et parfois elle accepte des lieux ensoleillées pendant une partie de la journée. 

 

Il ne la faut pas beaucoup de sol, un trou dans un muret suffit !  Pour pousser, la Doradille noire préfère des endroits pas tout à fait horizontales, même si en général elle ne cherche pas trop la verticalité.


 

Cette fougère élégante et légère ne devient jamais plus grande d'un demi-mètre. 

 

 

Au bord d'un chemin forestier, sous les chênes pubescentes, la Doradille noire a formé une grande colonie.  Au mois de mai quelques frondes de l'an dernier sont encore présentes mais elle jaunissent et vont disparaître bientôt.